Lors de sa réunion du mercredi 9 novembre 2016, la commission des affaires sociales du Sénat a examiné le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2017.
Son rapporteur général, Jean-Marie Vanlerenberghe (UDI-UC – Pas-de-Calais), a contesté la réalité du retour à l’équilibre de la sécurité sociale proclamé par le Gouvernement, dans la mesure où :
– le déficit du régime général prévu par le PLFSS, Fonds de solidarité vieillesse (FSV) inclus, est encore de 4,2 milliards pour 2017 ;
– sa diminution de 3 milliards par rapport à 2016 tient pour partie à une accumulation d’opérations comptables tendant à gonfler les recettes et minorer les dépenses de manière très artificielle ;
– les projections au-delà de 2017 se fondent sur des hypothèses macro-économiques des plus théoriques.
C’est notamment le cas pour l’assurance maladie, avec des ponctions significatives sur les réserves du FSV ou de fonds hospitaliers, des charges transférées sur d’autres périmètres et la création d’un fonds pour l’innovation pharmaceutique qui financera des dépenses de médicaments l’an prochain en dehors du périmètre de l’objectif national des dépenses d’assurance maladie (Ondam). Jean-MarieVanlerenberghe a chiffré à 2,5 % l’augmentation réelle de l’Ondam pour 2017, une fois ces diverses opérations neutralisées, au lieu des 2,1 % annoncés et de 1,75 % en 2016. Dans ces conditions, la réduction annoncée du déficit (2,6 milliards prévus en 2017 contre 4,1 milliards en 2016) ne traduit en rien une réelle maîtrise des dépenses ou l’impact de réformes d’organisation qui auraient amélioré l’efficience du système de santé.
Pour le secteur médico-social, le rapporteur, René-Paul Savary (Les Républicains – Marne), s’est inquiété de la soutenabilité des dépenses dès lors qu’une partie d’entre elles sera financée par appel aux réserves de la Caisse nationale de solidarité pour l’autonomie (CNSA), qui pourraient être épuisées en 2018. Il a jugé cette situation d’autant plus préoccupante qu’un retard important a été pris dans la création de places d’accueil dans les établissements et services pour les personnes handicapées.
Caroline Cayeux (Les Républicains – Oise) , rapporteur pour la branche famille, a constaté que le déficit de celle-ci serait d’1 milliard en 2016, au lieu de 800 millions prévus, avant un retour à l’équilibre annoncé pour 2017 dans un contexte où la faible inflation et la baisse du nombre des naissances freinent la progression des dépenses. Elle a contesté le choix des économies opérées ces dernières années, qu’il s’agisse de la remise en cause du principe d’universalité par la modulation des allocations familiales ou de la réforme du congé parental, et estimé qu’en se concentrant désormais sur le soutien aux faibles revenus, la politique familiale est détournée de sa vocation originelle.
S’agissant de l’assurance vieillesse, le rapporteur, Gérard Roche (UDI-UC – Haute-Loire), a rappelé que le déficit du FSV se maintenait à 3,8 milliards en 2017, portant le déficit global de la branche à 2,2 milliards. Il a souligné le coût croissant du dispositif de retraite anticipée pour carrière longue, qui atténue le rendement de la réforme de 2010. Il a mis en doute les perspectives d’équilibre à moyen terme annoncées par le Gouvernement pour les régimes de retraite car elles s’appuient sur des hypothèses manifestement très optimistes et occultent les besoins de financement des régimes du secteur public.
Le rapporteur pour la branche accidents du travail et des maladies professionnelles, Gérard Dériot (Les Républicains – Allier), a souligné que, comme en 2016, celle-ci consacre désormais près d’un cinquième de ses dépenses à des transferts, principalement au profit de l’assurance maladie, en contradiction avec la logique assurantielle et préventive sur laquelle devrait se fonder son fonctionnement. Les perspectives financières de la branche reposent sur un relèvement des cotisations employeurs à compter de 2018. Or, la trajectoire excédentaire justifierait au contraire une réduction de ces cotisations, parallèlement à un renforcement des actions de prévention. L’accroissement des excédents ne doit en aucun cas conduire à de nouvelles dépenses de transfert, destinées à renflouer les autres branches dans une logique comptable.
Suivant les conclusions des rapporteurs, la commission des affaires sociales a décidé de proposer au Sénat le rejet des équilibres financiers de la sécurité sociale pour 2017, ainsi que des objectifs de recettes et de dépenses des différentes branches.
Par ailleurs, à l’article 10 relatif aux seuils d’assujettissement aux cotisations sociales des revenus tirés des activités liées aux plateformes numériques, la commission a adopté un amendement visant à retenir un seuil unique de 15 000 euros par an, tant pour la location d’immeubles que pour les autres activités.
Elle a supprimé l’article 16 instituant une contribution à la charge des fournisseurs de tabac, et l’article 19 bis ouvrant la possibilité d’une codésignation d’un opérateur pour la couverture prévoyance au sein des branches professionnelles.
La commission a également supprimé l’article 43 quater, qui prévoit le recours à un règlement arbitral en cas d’échec des négociations en cours sur un avenant à la convention des chirurgiens-dentistes et l’article 52 bis sur les modalités de fixation des tarifs de radiologie, estimant que ces dispositifs faussaient les discussions conventionnelles à venir.
Elle a supprimé l’article 49 instituant un fonds de financement de l’innovation pharmaceutique, y voyant principalement un moyen de réduire artificiellement l’Ondam en puisant dans les réserves du FSV et considérant que les dépenses de médicaments innovants pouvaient être prises en charge sans création d’un tel dispositif.
Conformément aux conclusions de son rapport sur la politique du médicament, elle a adopté un amendement tendant à amorcer la rénovation de l’évaluation du médicament.
Au total, la commission des affaires sociales a adopté 92 amendements.
Le Sénat examinera le projet de loi en séance publique à compter du mardi 15 novembre.