« Lors de l’université d’hiver de la Fédération Nationale des Etablissements d’HAD, la Ministre des Solidarités et de la Santé a annoncé la mise en place dès 2018 d’une levée des restrictions d’interventions des établissements d’HAD en Ssiad. Garantissant que ces « interventions conjointes sur tous les modes de prises en charge » s’effectueraient « sans restriction », Agnès Buzyn a précisé que cette mesure bénéficierait « en particulier aux patients âgés, fragiles et en fin de vie ».
En faisant ce choix, la Ministre des Solidarités et de la Santé a pris la responsabilité d’une mesure inutile, inflationniste en termes de dépenses pour l’Assurance Maladie et ne constituant, en réalité, qu’une réponse à un intense travail de lobbying réalisé par la Fnehad depuis 2008.
En effet, dès 2008, une réunion Fnehad-ADMR-UNA eut lieu sur le thème de la coopération entre HAD et Ssiad. En 2013, une étude commune fut même réalisée[i], dont la conclusion instilla l’idée que le besoin de coopération renforcée entre les deux types d’institutions était bien réel afin d’ « éviter les ruptures de prises en charge de certains patients ».
Or, cette conclusion ne repose, en réalité, que sur 51 patients pour lesquels les personnels de Ssiad et HAD déclarent qu’une « coopération renforcée Ssiad-HAD aurait été souhaitable ». Cinquante-et-une situations en 8 mois… alors que l’étude portait sur 39 Ssiad et 13 HAD (soit un total à minima de 1860 patients). Au final, le besoin de coopération renforcée Ssiad-HAD ne correspondrait donc au maximum qu’à seulement 2,7% des patients ! Et peut-être d’ailleurs moins… car on remarque que les 51 situations qui posaient apparemment problème ont abouti à une rupture de parcours dans uniquement 6 cas : soit 0,32% des situations… La manipulation statistique est, donc, ici, flagrante !
Désapprouvant cette manière non-objective de faire, le Sniil dénonce, tout d’abord, avec force le manque total de clairvoyance dont a fait preuve le Ministère dans cette affaire.
Par ailleurs, le Sniil s’étonne du manque de perspicacité de ces mêmes instances sur ce dossier. Ainsi, un fait très important et largement décrit dans le rapport de la Mission d’Evaluation et de Contrôle des Lois de Financement de la Sécurité Sociale (MECSS) a été totalement occulté par le Ministère : à savoir, la différence importante des forfaits accordés aux Ssiad (70€/jour) et aux HAD (200€/jour)[ii]. Or, à cette heure, les coûts de soins infirmiers libéraux sont toujours inclus dans les forfaits des Ssiad… Dès que le volume de ces soins dépasse un certain seuil, les SSIAD se voient donc obligés de rompre la prise en charge de patients devenus trop lourds financièrement.
Face à cette situation, le Sniil rappelle donc la proposition émise et transmise dès les élections présidentielles à tous les candidats et leurs équipes : sortir les coûts de soins infirmiers libéraux des forfaits de Ssiad.
Cette initiative permettrait :
- l’absence de rupture de prise en charge des patients de Ssiad puisque ces derniers continueraient à être suivis par l’infirmière connaissant déjà leur(s) pathologie(s), domicile, famille et entourage
- l’assurance d’une couverture à 100% des besoins des patients de Ssiad puisqu’’à l’inverse des 302 HAD et de leurs 3027 infirmières salariées[iii], les 90 000 infirmières et infirmiers libéraux sont présents au plus près des malades, partout sur le territoire, 7j/7j et 24h/24h
- une prise en charge globale bien plus économique pour l’Assurance Maladie puisque ne comportant aucun coût de structure, contrairement aux HAD
- un suivi des patients tout aussi professionnel que celui effectué par les HAD puisque, rappelons-le, l’HAD fait essentiellement appel à des infirmières libérales pour effectuer ses missions… tout en leur imposant des conditions tarifaires inférieures aux honoraires conventionnels
- un gain de temps précieux puisqu’à l’inverse de l’évolution réglementaire et de l’étude financière que nécessitent la mise en place d’une coopération Ssiad-HAD, la sortie des coûts de soins infirmiers des forfaits Ssiad ne nécessite qu’une volonté politique.
Regrettant le manque de considération du Ministère pour les infirmières et infirmiers libéraux, partenaires naturels et habituels pour plus de 80% des Ssiad[iv], le Sniil exige de toute urgence que les coûts de soins infirmiers libéraux soient exclus des forfaits Ssiad. Mais aussi que la prise en charge des patients « lourds » de Ssiad fasse l’objet d’une concertation au plus haut niveau AVANT que ne soit actée la coopération HAD-Ssiad qui se profile.
Le Sniil ne restera pas inactif face à ce qui apparaît comme un véritable coup de poignard dans le dos des infirmières et infirmiers libéraux. »
Pour tout contact : communication@sniil.fr
[i] « Favoriser les coopérations Ssiad/HAD pour améliorer les parcours des patients », étude ADMR, Fnehad, UNA, mai 2015 visible sur : https://www.apmnews.com/documents/201505191956500.Rapport_HAD-SSIAD.pdf
[ii] Rapport de la MECSS sur l’HAD, juillet 2016
[iii] seulement 3027 infirmières salariées en HAD selon le rapport d’activité Fnehad 2016-2017 pour 4 877 563 journées d’hospitalisation HAD
[iv] Etude Drees sur les Ssiad, Etudes et Résultats, sept. 2010, n°739