Aujourd’hui se tient la première réunion de concertation relative au projet de décret sur la pratique infirmière avancée. Il s’agit de la création d’un nouveau professionnel de santé, de formation universitaire Master II, autonome et responsable, et positionné entre les médecins et les auxiliaires médicaux.
En créant en 2016 ce nouveau statut, le Parlement avait pour ambition de « réorganiser les pratiques en définissant de nouvelles règles de partage entre professionnels de santé » afin « d’offrir de nouveaux services à la population et d’améliorer la qualité du processus de soins et ce dans un contexte d’une nécessaire structuration de l’offre de soins ambulatoire ». Mais le projet de décret d’application présenté par le Ministère de la Santé fait preuve d’une approche particulièrement restrictive et dénuée d’ambition.
Dans les nombreux pays où elle a été mise en place, la pratique avancée se caractérise, selon le Conseil International des Infirmières, par « un degré élevé d’autonomie professionnelle », « l’intégration de la recherche », « la gestion de sa propre charge de travail », « des compétences cliniques étendues et reconnues comme telles », et « des services de consultation ». Dans le projet de texte de décret, on ne trouve aucune mention des termes « consultation », ou encore « sciences infirmières ». L’infirmière de pratique avancée devra attendre de se voir attribuer par le médecin chacun de ses patients.
En raison du vieillissement de la population, de l’explosion des maladies chroniques et des polypathologies, de l’inégale répartition des médecins sur le territoire et donc du développement des déserts médicaux, les patients ont besoin de cette « profession intermédiaire ». De nombreux rapports et travaux l’ont affirmé, l’infirmier en pratique avancée pourrait combler un déficit dans l’offre de soins, assurer des prises en charge complexes, en particulier sur la coordination en médecine de proximité et/ou entre la ville et l’hôpital évitant ainsi des réhospitalisations dramatiques et coûteuses, ainsi que des consultations de suivi, des actes de soins, des orientations et des prescriptions permettant l’adaptation des traitements et leur observance.
« Nous avons bien conscience qu’un texte doit être le résultat d’un consensus mais celui-ci ne saurait se faire au détriment de l’amélioration de la réponse que doit apporter le système de santé aux besoins des patients. Nous espérons que Madame la Ministre comprendra que les déficits d’offre de soins actuels et à venir nécessitent la création de ce nouveau statut, véritable chaînon manquant de notre système de soins » déclare Patrick Chamboredon, Président de l’Ordre des infirmiers.
La difficulté de la profession, très majoritairement féminine, à être reconnue à sa juste valeur et à se voir ouvrir la voie vers une véritable autonomie résonne avec une particulière acuité en ce jeudi 8 mars 2018, Journée internationale de la femme . Si l’émancipation des femmes ne se fait pas sans peine, les infirmières connaissent les plus grandes difficultés à faire valoir leurs droits, leurs compétences, leurs savoir-faire et leur rôle pourtant indispensable auprès des patients. La crainte d’un « rendez-vous manqué » concernant la mise en place du statut d’infirmière en pratique avancée constitue un nouvel exemple criant de ce manque de reconnaissance.
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Adrien de Casablanca – adrien.decasabianca@gmail.com