Qu’a-t-on fait des grands discours du Président de la République qui promettait de reconnaitre et de valoriser les efforts des femmes et des hommes, paramédicaux de ville, pour leur courage, leur disponibilité et leur travail durant la crise sanitaire ? Disparue l’ambition de Ma Santé 2022, son décloisonnement, le travailler ensemble ? Détricoté le pacte de refondation des urgences pour lequel la kinésithérapie avait tant à apporter dans la prise en charge de la petite traumatologie et les affections musculosquelettiques ? Sans parler, dans le contexte actuel, de leur rôle dans la prise en charge post-covid. Où sont les promesses faites en ouverture du Ségur de la Santé portées par le ministre des Solidarité et de la Santé ?
Ce sont toutes ces questions que se posent aujourd’hui les kinésithérapeutes, amers en prenant connaissance de l’évolution du projet de loi Rist, visant à améliorer le système de santé par la confiance et la simplification, discuté ces derniers jours au Sénat.
Parmi les amendements portés conjointement par le CNOMK, la FFMKR, la FNO (fédération nationale des orthophonistes) et l’UNSMKL, il y avait celui relatif à l’accès direct. En effet, devant le besoin de libérer du temps « médecin », d’éviter l’encombrement inutile des services d’urgences, d’optimiser la gestion des soins non programmés, de fluidifier et d’optimiser le parcours patient, d’éviter les retards de prise en charge, d’éviter des actes et examens inutiles, de générer des économies, il nous semble indispensable que les kinésithérapeutes et les orthophonistes soient considérés et sollicités à leur juste valeur et que leurs compétences soient reconnues par, et pour, le système de santé.
Simplifier le parcours de soins en permettant aux patients d’accéder directement au diagnostic et traitement kinésithérapique (au vu de notre autonomie dans le cadre de notre exercice et du manque de connaissance des médecins sur nos compétences, nos actes et nos techniques), en le conditionnant à la production d’un bilan-diagnostic kinésithérapique, l’implémentation dans le DMP et la transmission au médecin traitant, est une solution pragmatique, notamment dans les zones sous-dotées ; tout en permettant au médecin d’êtreinformé en temps réel.
Depuis plus de 20 ans, les kinésithérapeutes ont dans leurs compétences la réalisation du bilan diagnostic. Depuis plus de 5 ans, le diagnostic différentiel est inclus dans leur formation. Cette dernière est reconnue par le ministère au Répertoire National des Certifications Professionnelles (RNCP) de niveau 7 européen, c’est- à-dire 5 années d’études supérieures validant 300 ECTS. Combien de temps encore faudra-t-il attendre pour que la population puisse bénéficier d’une prise en charge kinésithérapique sans obligatoirement passer par la « case médecin » ?
Mais le médecin traitant doit rester « le pivot du système de soins et permettre de réguler l’accès aux soins de masso-kinésithérapie » selon le Sénateur MILON (médecin) ; autrement dit, il faut sacraliser le petit pouvoir conféré aux médecins quant à la délivrance du « Bon à rembourser » qu’est la prescription de rééducation, malgré nos compétences, malgré notre niveau de formation, malgré le bilan-diagnostic kinésithérapique, malgré le diagnostic différentiel dans notre champ de compétence, malgré l’encadrement par des référentiels HAS (maîtrise économique), malgré le manque de connaissance des médecins sur nos savoirs et savoir-faire.
A moins que le problème ne soit ailleurs ! Qu’en serait-il si le médecin était rémunéré à hauteur d’une consultation pour prendre connaissance du bilan-diagnostic kinésithérapique et des informations relatives à son patient ? La démarche serait encore rentable pour tout le monde : le médecin gagnerait du temps, des examens complémentaires inutiles (radio, échographie,…) seraient évités, les risques de chronicisation induits par des délais trop importants et une prise en charge inadaptée seraient limités.
Pendant ce temps-là, de nombreux patients se tournent vers des « médecines alternatives » très discutables (naturopathie, étiopathie, …) pour lesquelles la question de l’accès direct ne se pose pas, profitant de l’inertie du Gouvernement, échappant complètement aux médecins et aux parcours de soins.
En sortie de séance au Sénat, l’accès direct a été accordé aux seuls orthophonistes, grâce à l’intervention d’une sénatrice orthophoniste de métier qui a défendu cet amendement contre l’avis du ministère de la santé.
Nous ne pouvons que nous réjouir de cette avancée légitime obtenue par nos collègues orthophonistes, leur souhaitant tout le soutien des députés et que le Gouvernement prenne la hauteur nécessaire pour leur permettre de franchir l’étape de la 2nde lecture à l’Assemblée Nationale.
Et nous espérons également que cette prise de hauteur permettra à notre ministre, Olivier VÉRAN, de considérer avec plus d’attention le rôle des kinésithérapeutes au service de la santé publique. La
FFMKR demande à être reçue et entendue par le ministre des solidarités et de la santé dans les délais les plus brefs.
Contact presse : Sébastien GUERARD, Président, president@ffmkr.org