Une consultation publique sur les obligations vaccinales imposées aux professionnels de la santé a été déclenchée le 14 novembre 2022 par la Direction générale de la santé [1]. L’objectif est de maintenir ou modifier les obligations vaccinales actuellement en vigueur qui concernent la diphtérie, le tétanos, la poliomyélite, l’hépatite B et la Covid-19. Cette consultation ranime un débat nécessaire face au choix entre recommandation et obligation compte tenu de la situation épidémiologique des maladies cibles, des risques sanitaires encourus et de la balance bénéfice / risque propre à chaque vaccination.
Les prises de position parfois polémiques exprimées en faveur ou en défaveur de l’obligation vaccinale ne doivent pas faire oublier que le métier de soignant n’est pas un métier comme un autre et qu’il impose un engagement moral respectueux du principe « Primum non nocere ». Ainsi, la vaccination des soignants contre certaines maladies infectieuses permet-elle de réduire deux risques liés à leurs activités de soin : celui d’être infecté par les patients et, inversement, celui d’infecter les patients. Si ces risques sont devenus minimes pour la diphtérie et la poliomyélite, ils restent majeurs pour l’hépatite B et doivent être considérés pour deux infections respiratoires nosocomiales, la grippe et la Covid-19.
En France, 129 épisodes de grippe nosocomiale ont été signalés entre 2001 et 2010, totalisant 1 623 cas et 48 décès chez les patients hospitalisés. Bien que la vaccination antigrippale des professionnels de la santé soit fortement recommandée depuis plusieurs décennies, les taux de couverture vaccinale demeurent très faibles, estimés entre 22 et 26% en mars 2022 [3]. Ce constat d’échec justifie le rétablissement de l’obligation vaccinale, adoptée en 2006 avant d’être malencontreusement suspendue la même année par le Conseil supérieur d’hygiène publique de France.
L’obligation vaccinale contre la Covid-19 a été instaurée le 15 septembre 2021 pour tous les professionnels travaillant dans les secteurs sanitaire et médico-social afin de lutter contre la transmission nosocomiale du SARS-CoV-2, particulièrement meurtrière chez les personnes âgées ou immunodéprimées. En raison de la durée limitée d’efficacité des vaccins actuels contre l’infection, plus courte que la protection contre les formes sévères, la HAS préconise de vacciner à l’automne prochain les personnes les plus à risque de forme grave de Covid-19 et de coupler cette vaccination à celle contre la grippe [5].
Ce couplage doit inspirer la mise en œuvre d’un programme annuel de vaccination obligatoire du personnel soignant afin d’assurer une couverture vaccinale efficace pendant la saison hivernale dans tous les établissements de santé et médico-sociaux hébergeant des patients à risque. Cette obligation vaccinale doit aussi concerner le personnel soignant et les auxiliaires de vie intervenant chez des personnes à risque maintenues à domicile.
Loin d’être une atteinte à la liberté individuelle, les obligations vaccinales qui s’appliquent aux professionnels de santé sont des mesures préventives indispensables pour éviter la transmission nosocomiale des infections ; admises par les soignants parmi les pratiques visant à protéger les malades hospitalisés, de plus en plus âgés et fragiles, elles font l’honneur de leur profession.
L’Académie nationale de médecine recommande que les vaccinations annuelles, chaque automne, contre la grippe et contre la Covid-19 soient incluses dans les obligations vaccinales des professionnels exerçant dans les secteurs sanitaire et médico-social.
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