Après l’échec des négociations conventionnelles en février dernier puis la parution du règlement arbitral, la question que chacun a à l’esprit est de savoir quand reprendront les négociations conventionnelles. Faudra-t-il attendre deux ans comme le permettent les textes réglementaires ? En mars, le ministre de la Santé nous avait annoncé qu’il souhaitait que ces négociations reprennent avant l’été. Force est de constater que tel ne sera pas le cas.
Aujourd’hui, alors que se prépare le projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) 2024 qui doit déterminer les moyens financiers qui seront donnés à la Santé l’année prochaine, tous les feux semblent être au rouge. Les déclarations et les rapports se succèdent venant du ministre de l’Économie, du directeur de la Direction de la Sécurité sociale (DSS) et du directeur de la Caisse nationale d’Assurance maladie (CNAM). Tous annoncent des milliards d’euros d’économies à réaliser sur la Santé et l’hypothèse de plus en plus probable est de se retrouver à nouveau avec une enveloppe financière rendant impossible toute chance d’aboutir à une convention médicale qui donne aux médecins les moyens d’améliorer l’accès aux soins tout en préservant la qualité de ces derniers.
Pourtant, d’autres feux clignotant au rouge devraient alerter ce gouvernement si la santé des Français fait encore partie de ses préoccupations. Le nombre de médecins traitants libéraux diminue beaucoup plus rapidement que prévu.
Certains abandonnent l’exercice libéral pour l’exercice moins contraignant de médecin traitant salarié. D’autres s’engouffrent dans des « niches » pour rester médecin généraliste mais ne plus être médecin de famille : médecins salariés dans des établissements de santé, médecins exerçant dans des centres de soins non programmés, médecins régulateurs de façon exclusive. Le cumul emploi-retraite attire de moins en moins. D’autres enfin, attachés à leur métier de médecin de famille libéral, choisissent le déconventionnement pour s’affranchir du poids des tutelles qui ne leur permettent plus d’assurer une médecine de qualité pour leurs patients.
Ce désengagement vis-à-vis de la médecine générale touche aussi les internes. De nombreux doyens nous alertent sur le nombre de plus en plus important d’internes en médecine générale qui font valoir leur « droit au remord » et change de spécialité médicale. La loi Rist et la proposition de loi Valletoux, de plus en plus contraignantes, incitent les internes en médecine générale à abandonner la spécialité médicale qu’ils auraient aimé pratiquer.
Les perspectives pour les dix années à venir vont ainsi s’avérer être bien en deçà des prévisions, d’autant que les conditions d’exercice vont nettement s’aggraver pour les médecins traitants libéraux qui subsistent, les incitant, eux aussi, à tenter d’échapper tôt ou tard à un métier synonyme de souffrance au travail du fait de la maltraitance exercée par les tutelles.
Cette situation ne semblant pas émouvoir notre gouvernement, de plus en plus de médecins généralistes s’engagent dans la voie de la désobéissance tarifaire pour tenter de préserver leur entreprise libérale alors que leurs charges explosent. Cela ne suffira bien sûr pas à redonner du sens à un métier où l’on réalise de plus en plus de consultations complexes de 30 à 45 mn rémunérées 25 €. En l’absence de perspectives d’une reprise rapide de négociations conventionnelles après l’été, ce mouvement de désobéissance tarifaire aura certainement vocation à s’étendre dans chaque cabinet médical.
Les Généralistes-CSMF souhaitent une reprise très rapide de cette négociation afin d’améliorer l’accès aux soins et les conditions d’exercice des médecins généralistes et ainsi arrêter l’hémorragie que subit notre profession. Pour autant, cette négociation ne pourra reprendre que si le gouvernement envoie des signes forts de chances de réussite afin de ne pas recommencer le simulacre de négociations du mois de février.
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