Les équipes du Département de Biothérapie avec le CIC Biothérapies (AP-HP/Inserm), et du service d’immunologie-hématologie pédiatrique de l’hôpital Necker Enfants-Malades (AP-HP), coordonnées par Marina Cavazzana, Salima Hacein-Bey Abina et Alain Fischer, les équipes du laboratoire Généthon pilotées par Anne Galy, directrice de recherche Inserm (Généthon/InsermUMR-S951) et les équipes de l’University College of London et du Great Ormond Street Hospital (Londres) coordonnées par Adrian Thrasher et Bobby Gaspar ont démontré l’efficacité d’une thérapie génique dans le Syndrome de Wiskott-Aldrich. Six des sept enfants traités ont vu leur système immunitaire rétabli et leur état clinique s’améliorer. Ces travaux publiés ce jour dans JAMA ont été réalisés avec le soutien de l’AFM-Téléthon.
Le syndrome de Wiskott-Aldrich est un déficit immunitaire complexe rare et sévère d’origine génétique, lié au chromosome X, dont la prévalence est estimée à 1/250 000. Il est dû à des mutations du gène codant la protéine WAS (WASp) exprimée dans les cellules hématopoïétiques. Cette pathologie, qui touche essentiellement les garçons, se traduit par des hémorragies, des infections graves et à répétition, de l’eczéma sévère et, chez certains patients, des réactions auto-immunes et l’apparition de cancers. Le seul traitement disponible à ce jour est la greffe de moelle osseuse qui nécessite un donneur compatible et peut provoquer des complications graves.
L’étude de phase I/II, dont Généthon est le promoteur, a été lancée en décembre 2010 et menée à Paris et à Londres pour traiter des malades sévèrement atteints, sans donneur compatible. Cette étude, qui est toujours en cours, vise à évaluer la faisabilité et l’efficacité d’une thérapie génique dans cette indication. L’article publié dans JAMA rapporte les résultats pour les sept premiers patients traités, âgés de 8 mois à 16 ans, et pour 6 d’entre eux la durée de suivi permet d’évaluer les premiers effets du traitement.
Le traitement consiste à prélever chez les malades des cellules souches sanguines porteuses de l’anomalie génétique, puis à les corriger au laboratoire en introduisant le gène WAS sain grâce à un vecteur lentiviral développé et produit par Généthon. Les cellules corrigées sont ensuite réinjectées aux malades qui sont, au préalable, traités par chimiothérapie afin d’éliminer leurs cellules souches malades ainsi que les cellules auto-immunes et faire la place aux nouvelles cellules corrigées (voir figure). Après réinjection, ces cellules vont alors donner naissance aux diverses lignées cellulaires qui composent le sang (globules blancs et rouges, plaquettes).
A ce jour, les patients traités ont montré des améliorations cliniques significatives. L’eczéma sévère et les infections graves ont disparu dans tous les cas. L’un des patients a vu disparaitre son arthrite, un autre a vu une amélioration majeure de sa vascularite des membres inférieurs qui l’obligeait à se déplacer à l’aide d’un fauteuil roulant, a pu retrouver une activité physique normale. Toutefois, le taux de plaquettes corrigées est variable d’un malade à l’autre.
Pour Marina Cavazzana et Salima Hacein-Bey Abina : «Les résultats obtenus dans cet essai clinique multicentrique constituent une avancée thérapeutique importante car ils concernent une pathologie complexe qui affecte la quasi-totalité des cellules sanguines avec des conséquences cliniques dramatiques. Après transfert de gène, les patients ont montré une amélioration clinique significative liée à la restauration de l’expression de la protéine WASp dans les cellules du système immunitaire et les plaquettes. L’efficacité du traitement d’un tel déficit pour lequel un niveau de correction élevé des cellules souches hématopoïétiques est requis, indique qu’il est désormais légitime d’espérer traiter d’autres maladies génétiques complexes comme celles affectant les globules rouges. »
Pour Fulvio Mavilio, directeur scientifique de Généthon, le laboratoire de l’AFM-Téléthon, promoteur de l’essai : « Nous sommes très contents et encouragés par les résultats de cette étude. C’est la première fois qu’une thérapie génique, basée sur des cellules souches génétiquement modifiées, est testée dans un essai clinique multicentrique, international qui montre un effet thérapeutique reproductible et durable, dans différents centres et différents pays. Pour les maladies très rares comme le syndrome de Wiskott-Aldrich, les essais cliniques multicentriques sont le seul moyen de prouver la sécurité et l’efficacité de la thérapie génique et rendre le traitement accessible à tous les patients. Nous suivons la même approche pour d’autres maladies rares et moins rares du sang. »
Pour Frédéric Revah, directeur général de Généthon : « Ces premiers résultats de notre essai thérapeutique pour le traitement du syndrome de Wiskott Aldrich sont très encourageants. Ils illustrent également la capacité des équipes de Généthon à mener non seulement la recherche amont pour concevoir les traitements pour ces pathologies rares et complexes, mais aussi à mettre en place des essais cliniques internationaux, à produire ces médicaments de thérapie innovante, à travailler avec des équipes internationales et à maîtriser les aspects règlementaires liés à ces essais en France et à l’étranger. Des compétences que nous mettons en œuvre pour d’autres essais internationaux de thérapie génique dans des maladies génétiques rares du système immunitaire, du sang, du muscle, de la vision ou du foie…. Nous poursuivrons l’essai en cours avec comme objectif la mise à disposition du traitement pour les patients. »
Pour le Pr Adrian Trasher : « C’est un exemple très fort de la façon dont la thérapie génique peut offrir un traitement très efficace pour les patients atteints de maladie génétique grave et complexe. C’est aussi une démonstration enthousiasmante de son potentiel pour le traitement d’un grand nombre d’autres maladies pour lesquelles les traitements existants sont soit insatisfaisants ou indispensables ».
> Contacts presse :
Inserm
Priscille Rivière
01 44 23 60 97 – presse@inserm.fr