Le 23 mai 2018, le gouvernement a signé le décret n° 2018-383 « autorisant les traitements de données à caractère personnel relatifs au suivi des personnes en soins psychiatriques sans consentement ». L’ADESM (Association des Etablissements participant au service public de Santé Mentale), la Fnapsy (Fédération Nationale des Associations d’usagers en PSYchiatrie) et l’Unafam (Union nationale de familles et amis de personnes malades et/ou handicapées psychiques) font part de leur grande inquiétude.
Ce décret autorise les Agences régionales de santé (ARS) à collecter des données qui pourront être l’objet d’une consultation nationale via un dispositif appelé Hopsyweb. Les raisons invoquées, à savoir faciliter la gestion administrative de ces patients et disposer de statistiques nationales, ne justifient en rien la constitution d’un tel fichier. S’il s’agissait d’un suivi des hospitalisations sans consentement à des fins statistiques et de suivi des situations, ce fichier national ne serait pas nominatif et ne contiendrait que des données anonymisées.
En outre, le texte précise que le droit d’opposition prévu à l’article 38 de la loi du 6 janvier 1978 dite « informatique et libertés », qui prévoit que « toute personne physique a le droit de s’opposer, pour des motifs légitimes, à ce que des données à caractère personnel la concernant fassent l’objet d’un traitement » — ne s’applique pas pour la mise en œuvre d’Hopsyweb.
Par ailleurs, ce décret n’est pas sans rappeler le discours du Premier Ministre du 23 février 2018 concernant le plan national de prévention de la radicalisation. En particulier la mesure 39 « actualiser les dispositions existantes relatives à l’accès et la conservation des données sensibles contenues dans l’application de gestion des personnes faisant l’objet d’une mesure de soins psychiatriques sans consentement (HOPSY) ». Jeter le voile de la suspicion sur les personnes ayant des troubles psychiatriques en les assimilant à des personnes radicalisées renforce le regard stigmatisant que porte la société sur elles.
Rappelons que les usagers de la psychiatrie hospitalisés sans consentement sont avant tout des personnes malades vulnérables et en grande souffrance qui ont besoin de soins. Pour celles et ceux qui doivent aider leurs proches malades psychiques contre leur gré, il n’y a souvent pas d’autre alternative que les soins sans consentement. C’est une démarche très douloureuse pour ces parents, enfants, frères, sœurs, conjoints, petits-enfants, qui doivent pouvoir s’en remettre pleinement au personnel soignant. Pour le personnel soignant, les soins sans consentement exigent de tisser, autant que faire se peut, un lien de confiance avec la personne malade et son entourage.
Avec ce décret, nourrissant les amalgames entre maladie psychique et terrorisme, c’est le secret médical et le processus de soins qui sont menacés. Nous, patients, proches, soignants, demandons une modification de ce décret afin que les données soient anonymisées.
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